Une Cour dédiée entièrement à la matière qu’est la propriété intellectuelle devrait voir le jour en Fédération de Russie le 1er février 2013. Cette Cour fonctionnera selon les modalités suivantes :
1) Première instance : la Cour sera compétente pour les litiges concernant la validité des droits de propriété intellectuelle mais également des appels des décisions rendues par le Rospatent, l’équivalent russe de l’INPI. Cette Cour traitera principalement des refus d’enregistrement de marques, de brevets et de dessins et modèles mais également des décisions de nullité d’enregistrement de marques et de brevets. En première instance, cette Cour traitera des appels du service fédéral antitrust concernant les actes de concurrence déloyale.
2) Aucun appel des décisions rendues par la Cour ne sera possible, les décisions de première instance seront d’application immédiate.
Les actions en déchéance pour non usage en droit des marques seront de la compétence de la Cour arbitrale de Moscou durant la période transitoire. Il semblerait qu’il soit plus juste de parler d’une Cour arbitrale dédiée à la propriété industrielle et non à la propriété intellectuelle en son ensemble puisque les droits d’auteur sont exclus de son champ de compétence. La création de cette Cour prend acte du fait que les litiges concernant les brevets notamment sont d’une technicité telle qu’ils requièrent des Cours spécialisées. Trente magistrats œuvreront pour la protection de la propriété intellectuelle au sein de cette Cour. Ceux-ci devront être spécialisés en propriété intellectuelle et pourront être assistés le cas échéant par des spécialistes indépendants extérieurs au système judiciaire. Chaque affaire fera l’objet d’un examen minutieux qui sera effectué par un collège de magistrats ou par un président seul.
La localisation géographique de cette Cour demeure encore incertaine, bien que le hub innovant de Skolkovo fasse partie des prétendants. Cette initiative prend place dans un cadre plus large et atteste de l’engagement prit par la Fédération de Russie pour une défense accrue des droits de propriété intellectuelle. La Fédération de Russie a ainsi ratifié un traité international qui a pour objectif sous-jacent de bâtir des principes directeurs qui protégeront de manière effective les droits de propriété intellectuelle en Fédération de Russie tout autant qu’en Biélorussie et au Kazakhstan. La construction des fonds baptismaux de cette Cour tend à pallier les incuries du système judiciaire russe dont les dysfonctionnements sont patents. Nombreux étaient ceux qui appelaient de leurs vœux un aggiornamento afin de désengorger les tribunaux où les affaires ayant trait à la propriété intellectuelle ne cessaient de croître de manière incrémentale.
La Fédération de Russie fait partie des pays que l’on désigne sous l’acronyme de BRIC’s, elle est devenue peu à peu un marché économique incontournable. La construction de cette Cour dédiée à la propriété intellectuelle prend acte du fait que les acteurs économiques souhaitent investir dans un marché lorsque celui-ci est stable et attractif. En unifiant la jurisprudence en matière de propriété intellectuelle et en améliorant la qualité des décisions rendues cette Cour devrait permettre in fine aux titulaires de droit de défendre de manière efficiente leurs droits de propriété intellectuelle dans le pays.
Reste à savoir si cette Cour sera véritablement érigée ou non, et si oui par quel gouvernement. Son apport pourrait être bénéfique, bien que le tumulte politique qui transperce le pays de toute part laisse présager que cette Cour sera une véritable arlésienne. De plus, cette Cour ne semble pas représenter une arène possible pour le règlement extrajudiciaire des litiges liés aux noms de domaine ce qui semble regrettable au vu de l’inexistence d’une telle Cour en Russie. Il semblerait louable de proposer que la Cour soit également compétente en la matière bien que ce dessein ne soit sûrement pas réalisable dans un futur proche cette nouvelle enceinte consacrée à la propriété intellectuelle pourrait être un laboratoire intéressant pour des développements futurs en matière de contentieux relatifs aux noms de domaine.