Le 14 mai dernier, l’ICANN annonçait la désignation du Professeur Alain Pellet en tant qu’Opposant Indépendant (OI) en matière de nouvelles extensions[1]. Les titres honorifiques ainsi que l’expérience certaine du Professeur émérite le prédestinaient à remplir cette fonction au service de l’intérêt général des internautes. A la fois praticien et théoricien du droit, le professeur Alain Pellet est notamment intervenu en tant qu’avocat à la Cour Pénale Internationale dans des affaires importantes. Cette désignation fait suite à l’appel à candidatures lancé par l’ICANN en novembre 2011. Le choix de l’ICANN s’est fait tant en passant par les services d’un cabinet de conseil en recrutement qu’en étant à l’écoute des bruits de couloirs.

L’Opposant indépendant fait partie d’un des quatre piliers prévus par l’ICANN dans la phase d’objection des nouvelles extensions.

L’OI a un pouvoir limité dans son étendue ce qui n’en amoindrit pas son rôle pour autant. L’OI a qualité pour former une objection devant la Chambre Commerciale Internationale (CCI) dans le cas restreint de l’occurrence d’une candidature qui porterait atteinte à l’intérêt public et à la communauté. C’est donc dans le cas d’une candidature qui serait hautement préjudiciable[2] à l’intérêt public que l’OI peut formuler une objection. Aucun membre de l’ICANN n’a qualité pour ordonner à l’OI de former une objection, ce qui explique son titre. Deux types d’objections peuvent être formés par l’OI :

  1. 1. Les objections limitées à l’intérêt public :

-Cette objection peut être initiée si la candidature pour une nouvelle extension s’avère contraire à la morale ou à l’ordre public tel que ces concepts sont reconnus par les règles internationales-

  1. 2. Les objections de la Communauté :

-Dans le cas où une part significative de la Communauté visée par la candidature pour une nouvelle extension s’oppose fervemment à ladite candidature, l’OI pourra faire une objection au nom de la Communauté.

Le fait de former une objection limitée à l’intérêt public n’empêche pas l’OI par ailleurs de former une objection portant sur la même extension au nom de la Communauté. Avant de formuler une objection, l’OI peut réaliser en amont une consultation publique au sein de ladite Communauté. Si au terme de cette consultation, personne ne s’est manifesté à l’encontre d’une candidature pour une nouvelle extension, l’OI ne pourra pas présenter d’objection. Soulignons ici que sauf cas exceptionnels, l’OI ne sera pas habilité à présenter une objection à l’encontre d’une candidature si une objection a déjà été formulée au préalable par le truchement d’une autre procédure prévue par l’ICANN.  L’OI n’est pas la seule personne capable d’initier ces deux types d’objection mais la désignation de cette entité aura pour conséquence d’augmenter le nombre d’objections et donc d’assurer aux internautes une plus grande sécurité quant au respect de l’intérêt général. Les candidatures xénophobes ou homophobes par exemple pourront être ainsi écartées. L’OI devra rendre public au sein de rapports ses activités ainsi que le temps qu’il y a consacré, compte tenu du nombre de candidatures pour les nouvelles extensions, ce travail risque d’être particulièrement chronophage.

De nombreux commentateurs soulignent que le rôle de l’OI est encore flou et que seulement la pratique révélera la pertinence de cette procédure. Compte tenu des titres honorifiques du Professeur Pellet ceux-ci augurent à n’en pas douter d’un travail de qualité. Nous félicitons le Professeur Pellet dont la sagacité ne manquera pas de nous éclairer sur des points de droit d’importance.


[1] Un exposé détaillé des fonctions de l’Opposant Indépendant est accessible dans le Guide de candidature gTLD au point 3.2.5.

[2] « Hautement discutable » selon les mots du Guide de candidature gTLD de l’ICANN.