Avec l’arrivée sur le marché des nouvelles extensions de noms de domaine (new gTLDs), la chaine du e-commerce est en passe d’être bouleversée. Des extensions génériques telles que le .search ou encore le .shop vont sensiblement impacter l’internet. Depuis peu, les extensions .wine et .vin sont au cœur de débats intenses entre la communauté de l’internet et les instances européennes.
Aucun des acteurs français et européens des vins ou spiritueux n’a déposé de candidature pour ces extensions. De fait ce sont des sociétés étrangères, américaines pour la plupart, qui ont postulé pour gérer ces new gTLDs. Une seule candidature a été déposée par Donuts Inc pour le .vin, et trois sociétés ont candidaté au .wine. L’ICANN a alors annoncé que le .wine sera mis aux enchères courant janvier 2015. Ces extensions, nécessaires pour permettre le commerce en ligne de produits liés au vin, posent pourtant des problèmes majeurs.
C’est ainsi que le GAC, un organe consultatif de l’ICANN représentant les gouvernements, avait émis un avertissement dès 2012 concernant l’extension .vin. En effet un règlement européen définit un cadre particulièrement strict autour des pratiques œnologiques et notamment pour l’appellation de « vin ». Le GAC soulignait déjà que le registre ne devrait pas permettre des enregistrements totalement ouverts pour ne pas tromper le consommateur.
Récemment la levée de boucliers est venue de la part des gouvernements européens, et notamment français. En cause la protection des indications géographiques telles que Champagne ou Bordeaux. Car en effet si les marques enregistrées sont protégées, tel n’est pas le cas des indications géographiques. De fait, rien n’interdirait à un tiers de réserver le nom <champagne.vin> pour commercialiser des vins d’Alsace ou de Provence, voire des produits totalement différents. En définitive, le consommateur serait donc nécessairement trompé. Et aucune des trois candidatures ne propose de protection s’appuyant sur les indications géographiques. Axelle Lemaire, secrétaire d’état français chargée du numérique, a donc réitéré à plusieurs reprises la demande du gouvernement français de prévoir une procédure équivalente à l’UDRP pour les indications géographiques dans ces extensions.
A l’heure actuelle, le consensus est encore loin. En septembre 2013, le président du GAC a écrit au Conseil d’administration de l’ICANN une lettre de recommandation afin que les dossiers de candidatures concernant les domaines .wine et .vin soient soumis au processus d’évaluation classique. Cela ne semble pas tenir compte de la majorité des opinions exprimées au sein du GAC.
En effet, le communiqué du GAC publié après la réunion de l’ICANN à Buenos Aires en novembre 2013, fait clairement apparaitre cette opposition. Les opposants à ces gTLDs demandaient que les candidatures soient suspendues tant que des mécanismes de protection supplémentaires ne sont pas mis en place. Leurs partisans au contraire que les garde-fous sont suffisants et qu’il ne revient pas à l’ICANN de réglementer les indications géographiques.
Pourtant la question se pose réellement, dans la mesure où d’autres extensions sectorielles telles que le .archi et le .bio ont mis en place des conditions strictes à l’enregistrement afin de ne pas tromper le consommateur. Mais les candidatures ne sont pas supposées évoluer, il serait donc en pratique quasiment impossible d’amender les règles du .vin pour l’amener à répondre aux demandes des uns ou des autres.
Le gouvernement français indique regretter que l’ICANN ne prenne pas en considération les mesures de sauvegarde proposées par les organisations de protection des indications géographiques. Celles-ci étaient jugées nécessaires pour assurer aux producteurs de vins d’appellation d’origine comme aux consommateurs la protection indispensable contre les abus sur Internet.
Alors que se tenait la réunion de l’ICANN à Londres au mois de juin, aucun consensus n’a été trouvé. A suivre !