Symbole copyrightLa Cour de Cassation a confirmé le défaut de caractère distinctif du terme « argane », constituant une désignation nécessaire et générique des produits cosmétiques d’hygiène et de soin de la peau désignés par la marque. (CCass, Com., SAS Pierre Fabre dermo-cosmétique c/ Sté Clairjoie, 6 mai 2014, n°13-16470)

En 2010, Pierre Fabre, titulaire de la marque « Argane » depuis 1983, a attaqué Clairjoie en contrefaçon pour utilisation commerciale de la marque « Karité-Argane ». En défense, Clairjoie a requis la nullité de la marque « Argane » pour dépôt frauduleux et défaut de caractère distinctif.

La Cour d’appel, validant le jugement du Tribunal de Grande instance, a maintenu l’annulation de la marque litigieuse « Argane ». La Cour d’appel a confirmé qu’« Argane » n’est pas un néologisme féminisant l’expression « huile d’argan », mais un mot d’origine arabe.
La société défenderesse s’est arguée de la confusion des juges entre le caractère évocateur et le caractère distinctif de la marque, de l’absence de référence à la perception des consommateurs et de l’absence de démonstration du caractère générique et nécessaire.

Cependant la Cour de Cassation a rejeté les arguments de Pierre Fabre en précisant que la Cour d’appel a justement statué en se référant au public concerné par les produits de la marque. Elle a aussi rappelé que le terme choisi, aussi orthographié « argan » et désignant un arbre ou un arbrisseau ainsi que son fruit, utilisés pour la fabrication du savon, « constituait la désignation nécessaire et générique d’une substance végétale employée pour l’hygiène et les soins de la peau qui devait demeurer à la libre disposition des acteurs de l’activité économique concernée désireux de l’introduire dans la composition de leurs produits ». Elle confirme donc « que ce terme était exclusivement descriptif de la composition des produits désignés par la marque », justifiant l’annulation de la marque.

Cet arrêt, qui met un terme à plus de 30 ans d’exploitation de la marque « Argane », souligne le renforcement de la sévérité des juges à l’égard du caractère descriptif d’une marque, soulignant son défaut de distinctivité. Ce dernier n’était pas évident du fait de la différence de prononciation. En outre, le terme « argane » est peu employé. Cette décision soulève aussi la délicate question de la différence entre le caractère évocateur et l’absence de caractère distinctif. Enfin, cet arrêt remet en question les conditions d’acquisition du caractère distinctif par l’usage. En effet, si une telle ancienneté et une exploitation constante et intensive de la marque n’ont pas suffi aux juges pour octroyer la distinctivité à Argane, alors quelles conditions faut-il remplir ?