Icons11Le 1er octobre 2016, le contrat liant l’ICANN (The Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) à l’Etat américain est arrivé à expiration.

Rôle de l’ICANN

L’ICANN gère, entre autre, les ressources mondiales de l’Internet, c’est-à-dire qu’elle s’occupe de la gestion et de la normalisation de l’adressage sur Internet tels que l’allocation d’adresses IP, le DNS, les Protocoles IP. Il s’agit de la fonction IANA : Internet Assigned Numbers Authority. Cette fonction, gérée par l’ICANN, était jalousement conservée par le gouvernement américain puisqu’il s’agit d’une fonction critique sur le réseau.

L’émancipation de l’ICANN

L’ICANN s’est donc émancipé le 1er octobre 2016 de l’Etat américain et plus précisément du département du Commerce ou NTIA (United States Department of Commerce National Telecommunications and Information Administration).

La fonction IANA était la chasse gardée des Etats-Unis depuis la création de l’ICANN en 1998. Lors du transfert d’Internet vers le secteur privé, le gouvernement américain avait obtenu un contrat plaçant le tribunal de commerce des Etats-Unis en arbitre ultime. Le pays avait alors le dernier mot sur chaque décision de l’ICANN et la capacité de bloquer les décisions qu’il percevait comme contraire à ses intérêts.

Si tel était un objectif affiché à long terme depuis sa création en 1998, le projet n’est devenu concret qu’après les révélations d’Edward Snowden durant l’été 2013 et le scandale sur la surveillance par la NSA. Les Etats-Unis, affaiblis  sur le plan de la diplomatie mondiale,  ont dû céder face à la pression exercée par plus de 150 Etats dont la Chine, la Fédération de Russie ou encore la France avec l’Afnic (Association Française pour le Nommage Internet en Coopération, gestionnaire historique du .fr). D’autant plus que les Etats-Unis n’étaient finalement plus les seuls maîtres de l’Internet puisque les entreprises chinoises Alibaba, Tencent ou encore Baidu pèsent presque autant que les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon).

C’est avec le 55e Congrès de l’ICANN à Marrakech, en mars 2016, que le projet de l’indépendance de l’ICANN a été annoncé pour 2016.

Après deux ans de travail intense et plusieurs blocages des sénateurs Républicains américains, les négociations ont enfin abouti à une nouvelle organisation, saluée par de nombreuses industries, personnalités, gouvernements, organisations.

Quels changements pour l’Internet et les internautes ?

Avant l’expiration du contrat, l’ICANN était sous la tutelle du département américain du commerce qui avait le pouvoir de mettre l’ICANN en faillite. Mais cette tutelle des Etats-Unis au-dessus du conseil d’administration est désormais supprimée.

Dorénavant, tous les acteurs du Net auront une voix et pourront prendre part aux décisions. Il a fallu créer des contre-pouvoirs avec une assemblée générale.

Cette assemblée générale se compose de quatre collèges :

–          Le secteur privé : il réunit des acteurs comme les GAFA, de grandes entreprises et des  PME ;

–          La communauté technique ;

–          Les gouvernements : composés de 160 membres avec une voix chacun ;

–          La société civile : les associations de consommateurs, de défense des libertés.

Cette assemblée peut, s’il a un consensus, bloquer une décision du conseil d’administration.

Les américains ne sont pas écartés de toute décision de l’ICANN. Ils font partie de l’assemblée générale, ont une voix et peuvent poser un véto contre une décision du conseil d’administration. Mais avec le temps et le changement des rapports de force, ils pourraient perdre de leur influence.

Le soucis majeur de l’ICANN sera donc dorénavant de mettre en place ce nouveau modèle multipartite. L’organisation devra veiller à faire évoluer sa culture afin qu’elle prenne bien en compte la diversité culturelle, d’âge, de genre, linguistique, de parcours professionnel. Chaque communauté doit pouvoir s’exprimer pleinement et être susceptible d’influencer l’organisation.

Sur son site internet, l’ICANN s’est félicité pour ce « moment historique ».

Sans doute aurons-nous davantage d’informations lors du prochain Congrès de l’ICANN, le 57e, qui se déroulera en Inde début novembre 2016.

L’affaire est donc à suivre… Dreyfus ne manquera pas de vous tenir informés des nouveautés relatives à l’ICANN et la gouvernance de l’Internet.