Dans une décision de la Cour d’appel de Paris du 8 novembre 2016 (Pôle 5, ch. 1, Monsieur X. / Team Reager AB et Stone Age Limited), les juges ont infirmé la décision d’un expert du centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI du 29 juillet 2013 qui ordonnait le transfert d’un nom de domaine au profit du titulaire d’une marque de l’Union Européenne antérieure à l’enregistrement du nom litigieux.
Le transfert du nom de domaine ordonné par l’OMPI
La société suédoise Team Reager AB, créée le 9 septembre 2010, spécialisée dans la conception de produits et services pour téléphones portables, avait lancé via sa société sœur Moobitalk UK Limited un kit mains libres dénommé “Moobitalk”. Elle avait enregistré le 10 février 2011 la marque verbale communautaire Moobitalk, désignant notamment des services de télécommunications, et avait cédé ses droits sur cette marque le 14 avril 2014 à la société Stone Age Limited.
- X., dirigeant de sociétés exerçant ses activités au Proche-Orient et plus particulièrement au Yemen, où il est né et où il réside, exploitait depuis plusieurs années des services de communication regroupés autour du suffixe “moobi” (transcription phonétique de “mobi” signifiant “téléphone mobile” en arabe), et spécialement des services de type “tchat” dénommés MoobiChat et Moobitalk, dans différents pays du Proche et du Moyen-Orient. Le 17 avril 2011, il avait enregistré le nom de domaine <moobitalk.com>.
La société Team Reager avait déposé une plainte UDRP auprès de l’OMPI contre M. X, et l’Expert avait ordonné le 29 juillet 2013 le transfert du nom de domaine <moobitalk.com> notamment au motif que Team Reager était titulaire de la marque communautaire Moobitalk antérieure au nom litigieux.
Une revendication de la titularité du nom
Mais le 27 août 2013, 8 jours après la notification de la décision, M. X. a assigné la société Team Reager devant le TGI de Paris, pour voir juger qu’il est le titulaire légitime du nom de domaine <moobitalk.com> et en obtenir la restitution. Le TGI a cependant rejeté les arguments avancés par M. X et a confirmé les actes de contrefaçon commis au détriment de la marque communautaire Moobitalk, ainsi qu’ordonné à titre de réparation le transfert du nom de domaine <moobitalk.com>.
M.X a néanmoins interjeté appel de cette décision afin de se voir restituer la titularité du nom de domaine litigieux. Et la cour d’appel a en effet considéré qu’il n’y avait pas de contrefaçon de marque dans la mesure où le site <moobitalk.com> ne visait pas un public situé en Union Européenne mais seulement au Proche et Moyen-Orient. Aussi, ni l’utilisation de l’extension générique « .com » ni l’utilisation de la langue anglaise sur le site internet ne démontraient la volonté du titulaire du nom de domaine <moobitalk.com> de viser le public européen.
Ainsi, la cour a infirmé le jugement du TGI et rejeté les demandes des sociétés Team Reager et Stone Age au titre de la contrefaçon de la marque communautaire Moobitalk et de la fraude des droits de la société TeamReager sur cette marque, et a ordonné la restitution du nom de domaine <moobitalk.com> au profit de M. X., son titulaire.
Peut-on faire appel d’une décision UDRP ?
Aussi, cette décision rappelle les règles d’un appel d’une décision UDRP. Cette action est en effet possible à condition qu’elle soit intentée dans un délai de dix jours à compter de la notification afin d’éviter l’annulation ou le transfert du nom. Ensuite, le tribunal compétent est soit celui du lieu du siège du bureau d’enregistrement, soit du lieu de domiciliation du titulaire du nom. Dans le cadre de la procédure relative au nom de domaine <moobitalk.com>, il convient de souligner l’indépendance des juges français vis-à-vis de l’OMPI, puisque la Cour d’appel de Paris a infirmé le jugement rendu par les Experts de l’organisation mondiale et a restitué le nom litigieux.