Intrinsèquement liées à la sphère internet, les crypto- monnaies ont fait irruption au sein de notre économie ces dernières années malgré une législation encore manquante.
La révolution des crypto-monnaies
Les crypto-monnaies sont des monnaies alternatives, dans la mesure où elle n’ont de cours légal dans aucun pays, ne sont régulées par aucune banque et fonctionnent comme un système de paiement pair-à-pair. Révolutionnant notre manière de penser l’argent, l’émergence de ces monnaies ont aussi montré une volonté croissante de s’émanciper d’un monde financier parfois trop régulé. De nombreuses crypto-monnaies ont été développées mais la plupart fonctionnent de manière similaire et dérivent de la première implémentation complète : le bitcoin. Créé en 2008 par un individu se couvrant du pseudonyme Satoshi Nakamoto, le Bitcoin représente pour ainsi dire l’archétype de la crypto-monnaie. Sa valeur ayant connu jusque fin 2017 une augmentation exponentielle, atteignant quasiment les 20 000 $ et ayant par la suite connu de fortes fluctuations, n’est que symptomatique de l’engouement et de la fascination que la crypto-monnaie a suscité.
Il reste cependant vrai que le droit a du mal à s’adapter à ce qui représente sans doute l’une des plus grosses révolutions de ces dernières années.
Le Bitcoin, une monnaie ?
N’entrant dans aucune des catégories juridiques préexistantes, le bitcoin ne peut être reconnu comme une monnaie légale, ni même une monnaie électronique. On lui substitue souvent la qualité d’ « indice financier » voire même de simple « bien meuble incorporel valorisable » pouvant faire l’objet d’une transaction.
En effet, une monnaie est classiquement considérée comme un bien particulier émis par l’Etat et dont la valeur est garantie par ce dernier. Vue par le droit des obligations, la monnaie se caractérise en outre par son pouvoir libératoire universel : le débiteur se trouve en effet libéré de sa dette une fois qu’il a remis à son créancier la somme d’argent due. Le pouvoir libératoire se dit alors d’universel dans la mesure où le créancier n’a pas besoin de donner son accord pour libérer le débiteur de sa dette. Cet effet libératoire est réputé de plein droit, compte tenu du pouvoir que la loi attache à la monnaie.
Or le bitcoin ne possède pas de pouvoir libératoire universel dans la mesure où un débiteur qui voudrait payer en bitcoin devra avoir obtenu au préalable l’accord du créancier. Ainsi un créancier qui refuserait un tel paiement ne s’exposerait pas aux sanctions de l’article R. 642-3 du Code Pénal qui interdit le refus d’accepter les billets et les pièces en euros ayant cours légal.
Le bitcoin ne remplit pas plus les conditions d’une monnaie électronique. En effet, l’article L.315-1 du Code monétaire et financier, qui transpose l’article 2.2 de la directive 2009/110/CE, définit la monnaie électronique comme une valeur monétaire qui est stockée sous une forme électronique, représentant une créance sur l’émetteur et qui est émise contre la remise de fonds aux fins d’opérations de paiement. Le bitcoin n’étant pas émis contre une remise de fonds, il ne peut répondre cette définition.
La Cour de Justice de l’Union Européenne a néanmoins estimé que le bitcoin « étant un moyen de paiement contractuel, elle ne saurait d’une part, être regardée ni comme un compte courant, ni comme un dépôt de fonds, un paiement ou un virement. D’autre part, à la différence des créances, des créances, des chèques et des autres effets de commerce (…), elle constitue un moyen de règlement direct entre les opérateurs qui l’acceptent ». Elle avait à ce titre apprécié que le bitcoin pouvait bénéficier des exonérations de TVA prévues pour les opérations financières, sans pour autant définir de manière plus précise la qualification des crypto-monnaies.
La fiscalité du Bitcoin
L’obscurité autour du statut juridique du Bitcoin ne signifie cependant pas que ce dernier échappe pour autant à toute régulation. La cellule TRACFIN, organisme du ministère de l’Économie et des Finances, chargé de la lutte contre le blanchiment d’argent et contre le financement du terrorisme, a publié en 2014 un rapport concernant la fiscalité des Bitcoins. Ce rapport précise en effet que les plus-values sur les Bitcoins sont ainsi soumises à l’impôt sur le revenu en France depuis le 11 juillet 2014 dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC) si les gains sont occasionnels ou celle des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) s’il s’agit une activité habituelle. Cette imposition n’est cependant valable que pour les ventes de Bitcoin, et ne s’applique pas lorsque la crypto-monnaie est simplement stockée dans un portefeuille virtuel. Les bitcoins sont en outre soumis à l’impôt sur les successions et les donations. Par conséquent, des bitcoins qui seraient donnés pourraient être requalifiés en donation déguisée et donner lieu au droit de donation pouvant aller jusqu’à 60% pour les personnes n’ayant pas de lien de parenté. Ces quelques informations données par la cellule TRAFCIN ainsi que celles données par la CJUE précisent quelque peu les contours du statut juridique des crypto-monnaies quand bien même ces derniers restent flous. Il est à ce titre important de rester attentif à l’appréhension à la fois de la jurisprudence française et européenne et des législations à venir sur la caractérisation de telles monnaies.
Ces quelques informations données par la cellule TRAFCIN ainsi que celles données par la CJUE précisent quelque peu les contours du statut juridique des crypto-monnaies quand bien même ces derniers restent flous. Il est à ce titre important de rester attentif à l’appréhension à la fois de la jurisprudence française et européenne et des législations à venir sur la caractérisation de telles monnaies.