Dans la quête de valorisation de l’image de marque, les sociétés ont notamment recours au réseau de distribution sélective qui a été jugé licite dans un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 13 juillet 2018, sous réserve que le choix des revendeurs s’opère en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif.

Dans sa définition économique, la marque constitue le signe de ralliement de la clientèle. En faisant l’acquisition d’un produit portant telle marque, le consommateur se situe dans l’expectative de retrouver la qualité y afférente et particulièrement s’agissant de produits de luxe.

Dans une stratégie de préservation de l’image de luxe de ses produits, Caudalie a instauré un réseau de distribution sélective avec les pharmaciens, structuré par deux types de contrats:

-l’un pour la vente au sein de l’officine,

-l’autre lié au premier qui permet d’y ajouter la vente à distance sur internet.

Cette stratégie vise donc à exclure la commercialisation de ses produits via des plateformes tierces.

Conformément à la mise en œuvre de ce processus, Caudalie avait enjoint la société Enova Santé, créatrice de la plateforme 10001pharmacies par laquelle les pharmaciens peuvent vendre leurs produits au public, de cesser toute commercialisation des produits de marque Caudalie et de supprimer toute référence à ces produits sur ce site.

Il résulte de plusieurs décisions juridictionnelles un long débat dans lequel l’enjeu était de savoir si l’interdiction faite par la société Caudalie aux pharmaciens de son réseau de recourir de façon visible à des plateformes tierces pour la vente sur internet de ses produits était justifiée.

Le contentieux prend fin par un arrêt du 13 juillet 2018 de la Cour d’appel de Paris dans lequel il est jugé que l’interdiction de revente en ligne des produits Caudalie sur une plateforme telle que le site 1001pharmacies ne constitue pas une restriction de concurrence caractérisée.

En l’espèce, les produits de la marque Caudalie sont qualifiés de produits de luxe et le seul fait qu’il s’agisse de produits de parapharmacie ne leur confère pas par nature la caractéristique de produits banals (sic), contrairement à ce qu’indique la société Enova Santé. Ainsi, l’interdiction de vente via des plateformes tierces apparait proportionnée à l’objectif de préserver l’image de luxe de ces produits. Il convenait en effet de constater que les conditions de présentation sur 1001pharmacies.com étaient de nature à porter atteinte à l’image de luxe que Caudalie peut légitimement vouloir protéger. A titre d’exemple, la plateforme proposait aux côtés des produits Caudalie des produits dont les caractéristiques étaient largement éloignées tels que les alarmes incendies ou les caméras de vidéosurveillance.

Cette décision n’est pas sans rappeler l’affaire Coty du 6 décembre 2017 dans laquelle la Cour de Justice de l’Union Européenne expose que la qualité de tels produits résulte non pas uniquement de leurs caractéristiques matérielles, mais également de l’allure et de l’image de prestige qui leur confèrent une sensation de luxe et cette sensation constitue un élément essentiel desdits produits pour qu’ils soient distingués par les consommateurs des autres produits semblables.

Ainsi, si cette décision vient confirmer la jurisprudence selon laquelle seule une justification objective peut légitimer une interdiction de vente dans un réseau de distribution sélective, une nuance est à apporter. En effet, la présente décision démontre qu’une analyse au cas par cas doit être opérée, notamment concernant les hypothèses où une société restreint son réseau de distribution pour des questions d’image. En effet, l’appréciation de ce qui nuit ou non à l’image de marque induit nécessairement une part de subjectivité.