La tant réputée Choucroute d’Alsace s’est enfin vue reconnaitre le 3 juillet 2018 son Indication Géographique Protégée (IGP) au niveau européen. Cette reconnaissance est l’occasion de revenir sur ce qu’est une indication géographique protégée et les enjeux que cela comporte au niveau local et international.

Après avoir obtenu son IGP au niveau national en 2012, c’est finalement cet été, le 3 juillet 2018 (Règlement d’exécution (UE) 2018/938 de la Commission), que la Choucroute d’Alsace a obtenu son label de protection au niveau européen grâce à l’Association pour la Valorisation de la Choucroute d’Alsace qui a déposé la demande et s’est battue pendant près de 20 ans pour obtenir ce label. Ce sont 48 producteurs et 11 choucroutiers qui vont désormais se soumettre au cahier des charges pour obtenir cet IGP à compter de janvier 2019.

Ici il ne faut pas confondre la choucroute avec le plat du même nom, l’IGP nationale et européenne concernent uniquement le chou constituant la base de ce plat.

L’indication géographique se présente comme une composante du commerce national mais avec l’importance des exportations celle-ci est également devenue une composante du commerce international, en tant que telle l’Indication Géographique a une valeur et des enjeux économiques.

L’IGP n’est pas un droit de propriété, par essence celle-ci est collective, l’usage est ouvert à toute personne du moment que le cahier des charges qui lui est attaché est respecté.

L’article 22 § 1er de l’accord ADPIC défini l’Indication Géographique (IG) comme servant principalement deux objectifs ; le premier est qu’elle indique une localité donc la provenance géographique du produit ; le second est qu’elle indique une qualité, une réputation ou une autre caractéristique du produit.

Au niveau européen, le Règlement de l’Union Européenne 1151/2012 du Parlement Européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires vient définir et établir la protection de l’Indication Géographique. Cette dernière est une dénomination qui identifie un produit qui est originaire d’un lieu déterminé, d’une région ou d’un pays, dont une qualité déterminée, la réputation ou une autre propriété peut être attribuée essentiellement à son origine géographique et, enfin, dont au moins une des étapes de production a lieu dans l’aire géographique déterminée.

En ce qui concerne la Choucroute d’Alsace, celle-ci est produite historiquement depuis le XVème siècle en Alsace dans les deux départements, le Bas-Rhin et le Haut-Rhin, où la culture du chou était particulièrement privilégiée, notamment en raison de la composition des sols et du climat.

La Choucroute est rattachée à un procédé et un savoir-faire de fabrication particulier qui doit être respecté, en effet le chou est mis dans des cuves de fermentation où la fermentation naturelle du légume aura lieu grâce aux bactéries lactiques présentes sur les choux et l’environnement. Le chou doit être préalablement coupé en fines lanières et salé. Ce procédé de fabrication et ce savoir-faire vont être consignés dans le cahier des charges applicable.

Même si dans l’esprit du consommateur une IGP est assimilée à une garantie de qualité, il n’en n’est rien en réalité. L’IGP tend uniquement à garantir l’origine du produit et le procédé de fabrication.

La Cour de Justice de l’Union Européenne s’est attachée à définir les fonctions essentielles de l’indication géographique. Elle tend à protéger les opérateurs et les zones de production ainsi que le consommateur sur l’origine et la typicité. Ces fonctions d’abord jurisprudentielles ont ensuite été consacrées dans les règlements européens. En tout ce sont trois règlements qui fixent les règles applicables aux IGP : le Règlement (CE) N° 110/2008 Parlement et du Conseil du 15 janvier 2008 pour les spiritueux, le Règlement UE n°1151/2012 du Parlement et du conseil du 21 novembre 2012 sur les produits agro-alimentaires et le Règlement UE N°1308/2013 du Parlement et du Conseil du 17 décembre 2013 contenant les règles applicables aux produits vinicoles.

Quant à l’article 13 du Règlement UE 1151/2012, il prévoit la protection qui est accordée aux dénominations enregistrée ; celles-ci sont protégées contre toute utilisation commerciale à l’égard de produits non couverts par l’enregistrement, ou lorsque cette utilisation permet de profiter de la réputation de la dénomination protégée ; mais également contre toute usurpation, imitation ou évocation même si l’origine véritable des produits est indiquée ; toute pratique susceptible d’induire le consommateur en erreur ; et contre toute autre indication fausse tenant à la provenance, l’origine, la nature ou les qualités essentielles du produit.

La protection conférée par une IGP reprend les règles relatives à la tromperie, la lutte contre les fraudes, la concurrence déloyale et le parasitisme et permet de se protéger par rapport, par exemple, à des choux cultivés et transformés dans d’autres régions ou pays via des méthodes non traditionnelles.

La reconnaissance d’une IGP présente donc un enjeu économique considérable au niveau local et international pour les producteurs mais permet également une protection du consommateur via une garantie d’origine du produit qu’il achète.